mardi 6 février 2018

Foi équilibrée ou fort dans la Foi ?

Nous glissons aujourd'hui le témoignage d'une personne qui a réagi après la lecture d'un article publié récemment dans un bulletin  de la FSSPX. Nous vous faisons partager cette réaction qui  nous rendra davantage vigilants, pour garder ce don si précieux de la Foi, des dangers qui viennent de là où on ne les attendait pas .

Source : Forum de la Fidélité Francophone 


Nous recevions avec plaisir un bulletin autrefois intéressant de la chapelle de xxx. Il reste aux trois quarts  intéressante mais quelle ne fut pas notre surprise de tomber sur un article titré de façon accrocheuse Un catholique "radicalisé". L'auteur de l'article est un jeune prêtre sorti tout fraîchement d'Ecône. Nous pensions que l'auteur ferait un petit croche patte aux sédévacantistes ou à je ne sais quelle hérésie romaine en cours. Mais non, visiblement l'abbé C. du C. s'en prend à ceux qui ne veulent pas évoluer avec le grand timonier suisse dans les magnifiques chemins du sens de l'histoire libérale.  L'abbé C. du C. essaye lourdement de faire une sorte de parallèle entre le pauvre Tertullien, qui a certes glissé dans l'hérésie montaniste, et les fidèles de la Tradition qui, actuellement, se radicaliseraient face à "des nouveautés et à de nouvelles questions" (lesquelles ? Elles ne sont bizarrement pas nommées).  Sans l'avouer, l'abbé C. du C. reproche aux fidèles et aux prêtres de la Fidélité de ne pas vouloir évoluer face à ces nouvelles questions que sont les accords pratiques avec la Rome conciliaire. Donc pour l'abbé C. du C., rester fidèles à la Foi et aux directives de Mgr Lefebvre, c'est se "radicaliser". 



L'abbé C. du C. nous explique pourquoi : "Nous avons besoin, affirme-t-il doctement, d'une vie de Foi équilibrée "!! Bigre ! C'est une nouvelle notion théologique que nous ignorions totalement, nous qui
Vie de foi équilibrée selon un Pasteur !
pensions avec Saint Thomas et toute l’Église que la Foi n'était pas une vertu morale mais une vertu théologale et que, contrairement aux vertus morales qui doivent se situer dans un juste milieu, les vertus théologales, quant à elles, n'admettent pas de milieu ou de limites puisque leur objet est Dieu Lui-même. Voilà donc la Foi et la théologie des nouveaux clercs d'Ecône. Ils sont en effet très mûrs pour le ralliement. 


Aussi nous invitons l'abbé C. du C. à relire Dom Sarda y Salvani dans son ouvrage "Le mal social, ses causes et ses remèdes" . Voilà comment ce prêtre vigoureux décrit la Foi faible (et pas radicalisée pour le coup) de certains :


Citation:
Il y a une façon si tiède et si faible d'avoir la foi, qu'elle diffère uniquement de l'incrédulité en ce qu'elle n'en fait pas parade, sans ajouter à ce vague acte de foi aucun caractère véritablement positif. Cette façon de croire, disions-nous, consiste plutôt à ne pas nier. C'est ainsi, nous le constatons, que croient malheureusenent un grand nombre de nos frères à l'heure actuelle. Ils ne nient pas l'existence de Dieu, la divinité du Christ et de son Église. Ils ne nient pas les récompenses et les peines de la vie future. Ils ne nient pas l'autorité du Pape, la vertu des sacrements, etc., etc. Mais ils ne sont pas convaincus intérieurement de toutes ces vérités. Ils ne les affirment pas explicitement, et avec la conviction sincère qu'ils mettent à affirmer les autres vérités, qu'ils tiennent pour certaines dans la sphère des connaissances humaines. Cette manière de croire pourrait se comparer à notre manière d'aimer certaines choses et certaines personnes dont on pourrait dire que nous ne les haïssons pas, avec plus de vérité que de dire que nous les aimons positivement. C'est un degré d'amour si voisin de l'indifférence, qu'il se confond avec elle plutôt qu'il ne s'en distingue. Ce n'est point ainsi qu'on aime véritablement ni que l'on croit sincèrement. La vraie foi, comme le véritable amour, qui sont deux sentiments égaux en quelque sorte, ont pour marque distinctive l'ardeur de l'élan, la fermeté de l'adhésion, la profondeur de la conviction. Cela est d'autant plus vrai qu'humainement parlant, avoir foi dans une idée, ou travailler avec foi pour cette idée, ne signifie ni la conviction, ni l'attrait que l'on a ordinairement pour les choses communes, alors même que nous les tiendrions pour certaines et véritables, mais bien une manière spéciale de tenir ces choses pour telles, une manière qui nous domine et qu’nous rend, pour ainsi dire, esclaves fanatiques d'une telle domination sur notre intelligence et notre volonté.

Fanatisme ![ndlr : ou radicalisme] Voilà bien la parole que le vocabulaire de l'impiété a inventée pour l'appliquer en mode de dérision à la vertu de foi portée à son plus haut degré. Ce que l'impiété appelle fanatisme [radicalisme] n'est ordinairement que cette vertu théologale de la foi placée au point convenable de vivacité et de vigueur où la possèdent les vrais enfants de Dieu. Celui qui tient pour certaines, plus qu'aucune vérité humaine, les vérités de la religion, celui qui accepte entièrement cette certitude supérieure basée sur l'autorité de Dieu même; celui qui, par conséquent, comprend tout ce qu'a de rigoureux le témoignage de cette autorité, ne peut être, dans l'ordre de ces vérités, autre chose qu'un fanatique dans le sens où l'on parle de fanatisme politique, de fanatisme scientifique, littéraire, expression qui ne désigne rien autre chose que le degré souverain et absolu de la conviction humaine dans l'intelligence, et de la résolution, conséquence de cette conviction, dans la volonté.

Extrait de la conclusion de l'abbé  C. du C. dans "Un catholique "radicalisé""



Citation:
Contrairement à certaines religions, un catholique qui se radicalise s’exclut de l’Église, puis qu’en durcissant sa doctrine, ses positions, il s’éloigne de la voie de la Tradition, de ce qui a été transmis. Tertullien tenait plus à sa vision de la religion qu’à la doctrine du Christ. Tant que les deux concordaient, il fut chrétien, et parmi les plus illustres, mais dès qu’il se laissa entrainer dans l’hérésie de Montan, libéré des règles de la Foi, il n’enseigna que ce que lui inspirait son esprit.
L’itinéraire de Tertullien, bien que malheureux est un enseignement pour notre vie de Foi, nourrie dans la soumission à ce qui a été cru partout, toujours et par tous. Aujourd’hui où le Magistère est actuellement éclipsé nous avons besoin d’une vie de Foi équilibrée pour se protéger des erreurs qui nous guettent de droite et de gauche, et face aux nouveautés ou à de nouvelles questions, nous devons rester attachés à la sagesse de l'Église maîtresse de vérité.

Je me permets de revenir sur ce sujet parce qu'au-delà de la simple anecdote, il est un symptôme révélateur d'un état général d'affaiblissement de la vie de la Foi dans le milieu catholique.

Quand on sait ce qu'enseigne St Thomas sur la vertu de Foi et les péchés qui en découlent, on comprend mal pourquoi un clerc qui a passé six années à Ecône nous sort de telles sornettes. Nous attendions autre chose qu'un prêtre nous dise qu'il faut avoir une Foi équilibrée.

L'acte de Foi est un assentiment aux vérités révélées et les péchés contre la Foi se situent justement dans le refus d'adhérer et pas la forte volonté d'y adhérer jusqu'au mépris de sa vie (martyre) . L'infidèle est en général dans un tel état d'esprit qu'il n'adhère pas aux choses de la Foi; il adhère à d'autres choses, il a le plus souvent là-dessus ses idées faites ou ses idées reçues ; mais toujours elles sont bien à lui, et il s'y attache non avec la vertu de Foi mais avec sa volonté personnelle et il n'en démord pas. Cet état d'infidélité peut être varié : l'un est dans un état bien déterminé de non croyance, l'autre est un état vacillant dans le doute. Dans ces deux cas, cela n'a rien avoir avec la Foi. C'est ce monde qui nous côtoyons tous les jours hélas, monde agnostique, d'ambiance sceptique où le dilettantisme ne cesse de les favoriser beaucoup. Il y a chez quasi tous une sorte d'affaiblissement général de la pensée à l'égard des vérités révélées (et même à l'égard de la vérité tout court) qui contribue à ôter le ressort.

Dans les chapelles de la Tradition, on n'est peut être pas encore dans la coupable dubitation mais il y a une mollesse spirituelle telle qui fait craindre le pire sous peu.

Prions pour rester forts dans la Foi.

Joseph 

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A l'approche du carême, nous nous permettons de rajouter un texte du RP Achille Desurmont
paru dans "La charité Sacerdotale" en 1900. Nous trouverons dans ce texte des éléments pour mieux lutter contre les tentations qui touchent la Foi :
 
Tout dans la vie chrétienne est combattu. Ainsi l’a voulu la Providence, pour que notre salut fût en même temps notre conquête et qu’ainsi la récompense nous fût doublement précieuse. Mais, après la chasteté, il n’est peut-être pas de vertu qui soit plus attaquée que la foi. C’est que, d’une part, elle est en opposition constante non pas avec notre raison mais avec ses caprices; et que, d’autre part, étant le principe du salut, elle est le point de mire de l’enfer.

Il est donc de toute nécessité que le croyant sache défendre sa croyance, et c’est ce que le prêtre doit lui apprendre soigneusement. A mesure que l’on s’approchera de la fin des temps, cette lutte pour la foi deviendra plus indispensable puisque Notre-Seigneur nous a prédit qu’alors les ténèbres s’épaissiront sur la terre, et que les élus eux-mêmes cesseraient de croire si cela était possible.

Contre notre foi nous avons d’abord les tentations du dedans.

Ce sont ou bien des fatigues d’esprit qui nous rendent bien onéreuse l’obligation de toujours forcer notre raison à penser surnaturellement; ou bien certains doutes généraux qui se répandent comme des nuages sur tout le domaine de la foi, et alors notre âme s’écrie : Mais si tout cela n’était qu’une illusion! Ou bien des objections terribles qui se forment dans notre esprit, comme celle-ci par exemple : Comment croire à la Providence en un monde où tout est en désordre? Ou bien de mystérieuses négations intérieures qui s’articulent contre tel ou tel dogme : Jésus-Christ n’est pas Dieu ; il n’y a pas de Dieu ; il n’y a pas de vie future, et le reste; ou enfin une sorte de résistance mentale au système même de la foi : Pourquoi croire? Qu’est-ce que l'Église? Qu’est-ce que la révélation? Et beaucoup d'autres réflexions du môme genre.

Quant aux tentations du dehors, les principales sont :

Premièrement, l'impiété des méchants, leurs livres, leurs dires, leurs maximes, leurs sarcasmes, l’atmosphère irréligieuse qu'ils répandent autour d'eux, l’hypocrisie ou le côté séduisant de leurs erreurs,

Secondement, le demi-christianisme des bons : on mêle à l’Évangile des principes suspects ; on ménage les erreurs de l'ennemi; on contracte quelque chose du mauvais esprit de l’époque, et, pour toutes ces raisons, la croyance des fidèles est ébranlée. .

Troisièmement, les incidents ou les spectacles qui scandalisent les faibles. Ce sont tantôt des mystères de la Providence qu’on ne s’explique pas et qui semblent choquer la raison, tantôt des obscurités qui se répandent sur l’Eglise ou sur ses ministres, nous cachent une partie du divin et nous montrent trop l’humain. Enfin de mille manières et pour bien des causes, la foi des chrétiens subit du dehors bien des assauts redoutables.

Pour résister à ces attaques jointes à celles du dedans, voici les règles à suivre telles que la charité nous les trace.

Contre les séductions de l'impiété, la fuite. L’Église met à l’index les livres pernicieux. Se faire à soi-même un index de ce genre, et s’interdire toute lecture, conversation, amitié, dangereuse pour la foi.

Contre les doctrines suspectes des demi-chrétiens, la défiance, avec le recours à l’Église et à ses pasteurs pour savoir toujours ce qu’il faut penser de ce que disent les hommes.

Contre ces deux premiers ennemis réunis, l’instruction religieuse, les bonnes lectures, la parole de Dieu.

Enfin, contre tous les ébranlements intérieurs de l’esprit provenant soit du dehors soit du dedans, parfois, quoique rarement, le recours raisonné aux motifs de crédibilité; parfois aussi, le recours au prêtre ou au chrétien instruit ou aux livres de bonne doctrine. Mais le plus ordinairement la réponse à la tentation par l’acte de foi, sans raisonnement, de parti pris, avec ténacité et mépris des suggestions. Enfin, par-dessus tout et en tout cas, la prière toujours : la prière pour demander et obtenir la victoire sur la tentation et l’augmentation de la foi en raison même des attaques qu’elle subit.

Sources de preuves. — Voir la jalousie extrême avec laquelle l’Église a toujours voulu défendre la foi de ses enfants plus que tons leurs autres biens. — Zèle des saints en faveur de la foi, notamment de saint Ignace, de saint Charles, de saint François de Sales, de saint Alphonse. — Enseignements des principaux écrivains ascétiques sur la manière de combattre les tentations contre la foi, par exemple Scaramelli, Dirett. Asc. tr. IV, a. 1, c. G.

Application. — Comment, de nos jours, ébranle-t-on les fondements même de la foi? Comment certains auteurs chrétiens contribuent-ils eux-mêmes à cet ébranlement?